La crise actuelle n'est pas seulement une crise financière, une crise de la dette, de la folie des traders et de l'économie casino. Plus profonde encore que la crise des années 1930, c'est celle d'une façon de produire, de consommer, de se nourrir, de se chauffer et transporter... Un monde qui devenait invivable est devenu impossible. Nous pouvons nous en sortir, démontre ici Alain Lipietz, à condition de faire retour, non seulement sur trente ans de libéralisme débridé, mais sur un siècle de productivisme irresponsable.
En 1932, Roosevelt avait proposé un New Deal entre les classes sociales. Ce n'est plus suffisant. Face à la crise alimentaire et sanitaire, et à la crise énergie-climat, il faut aussi un deal avec la nature, un Green Deal : un retournement dans notre rapport au travail, aux ressources naturelles, un retournement dans le rapport du public et du privé, de l'État aux individus, aux associations. Des nations à l'Europe, de l'Europe à la planète. Partant d'une analyse du modèle en crise, le " libéral-productivisme ", ce livre démonte les mécanismes multiples de cette crise, puis il présente les premiers pas d'un Green Deal, de la réponse cohérente aux crises financières, sociales, écologiques.
Mais les obstacles politiques et même psychologiques sont légion. Revenant alors sur la crise des années 1930, le livre recense sans concession les blocages, qui ne sont pas seulement les résistances des profiteurs d'un monde finissant. Il conclut par une pédagogie politique du changement.
Alain Lipietz, économiste, est député européen des Verts. Il est l'auteur de nombreux ouvrages.
La crise que nous traversons depuis 2007 n'est pas que financière, économique et sociale. C'est celle d'un modèle de développement libéral et productiviste complètement épuisé. Si le constat a déjà été dressé, il est démontré ici avec brio par Alain Lipietz. Le livre s'essaie ensuite à discerner ce que seraient les traits d'un bon modèle de sortie de crise : une finance régulée, moins d'inégalités, une planification écologique des politiques publiques, des techniques intensives en emplois pour remplacer l'exploitation de la nature, davantage de coopération internationale, d'économie sociale et solidaire. Alain Lipietz n'est pas naïf : il sait qu'un nouveau modèle de développement ne peut se réduire à l'application d'un plan qu'il suffirait de mettre en oeuvre. Aussi discute-t-il des contraintes et des oppositions politiques, mais aussi des moyens pour parvenir à réunir une majorité sur ce type de programme, dont il définit avec précision les modalités. Y arriver implique " des changements spectaculaires par rapport au modèle libéral-productiviste", conclut-il à juste raison. C'est pourquoi la transition ne saurait attendre.
2012-04-01 - Christian Chavagneux - Alternatives Economiques
C'est un sujet d'avenir. Il est un peu l'oublié de cette campagne électorale. Pourtant, le choix de notre modèle de croissance mérite bien, selon Alain Lipietz, un débat approfondi. Pour l'ancien député Vert européen, auteur de nombreux essais, notamment La Société en sablier. Le partage du travail contre la déchirure sociale (La Découverte, 1996), la "vertitude", qui consiste à mettre une petite touche verte sur son programme, n'est plus de mise. Seul un "pacte vert" peut constituer une réponse vigoureuse à la crise du "libéral-productivisme". Alain Lipietz ne nie pas la responsabilité de la finance dans la crise actuelle. Mais il veut montrer que le marasme a d'autres causes, plus profondes. Ce qu'il appelle le "noeud FFFF", par exemple, de l'anglo-saxon food (la nourriture), feed (la nourriture pour le bétail), fuel (la nourriture pour les machines) et forest (pour les réserves de biodiversité), s'est considérablement resserré depuis dix ans. En témoigne la hausse du prix des matières premières et des denrées alimentaires. "La possibilité d'une prospérité sobre et verte, assurant la sauvegarde de l'environnement et conduisant au plein-emploi, avec une équité accrue entre les humains, n'implique pas sa faisabilité politique", reconnaît l'auteur. Un "new deal" écologique en Europe demanderait en effet de l'argent frais. Comment en obtenir, sinon en "effaçant le passé", écrit Alain Lipietz, c'est-à-dire en monétisant la dette, au prix d'une dépréciation de l'euro ? Utopie, diront certains. Autre difficulté que l'auteur ne sous-estime pas : l'indifférence, voire l'hostilité, de l'électorat populaire à l'égard de l'écologie. Un nouveau compromis social et écologique est pourtant nécessaire, affirme Alain Lipietz, qui cite Gandhi : "Si une nation (comme la Chine ou l'Inde) se mettait à exercer une exploitation économique du même type (que celle de l'Angleterre), elle dévasterait le monde comme un nuage de sauterelles." Sans une pédagogie du changement, il y aura, prophétise Alain Lipietz avec des accents churchilliens, de la sueur, du sang, et des larmes.
2012-04-11 - Philippe Arnaud - Le Monde Economie
Alain Lipietz est un auteur rare associant une expérience au Parlement européen et une réflexion rigoureuse d'économiste, un engagement européen et une connaissance profonde des réalités internationales. Avec Green Deal, il a voulu contribuer au débat des élections présidentielles et présenter les fondements des solutions des écologistes. Il compare la situation actuelle avec la période précédent le New Deal de Roosevelt: "Un modèle se meurt, un nouveau modèle ne parvient pas à voir le jour". La comparaison permet de rapprocher la politique d'Angela Merkel de celle de Hoover, qui mena à la catastrophe. [...] On peut regretter que ce livre très riche n'ait pas suscité plus de débats. Mais il garde toute sa pertinence pour les défis à relever.
2012-09-01 - Crisla Lorient - Altermondes
Pourquoi la France rate-t-elle la révolution écologique ? Parce qu'il lui faudrait entrer dans une nouvelle économie, et qu'il s'agit, fondamentalement, d'une mutation culturelle. Or, la France a construit après guerre son modèle gaulliste, ultra centralisé, planifié, et il lui colle à la peau comme un vieux Scotch. Cette critique du modèle vient d'un de nos économistes les plus reconnus, l'écologiste Alain Lipietz, d'autant mieux fondé à le critiquer qu'il le connaît de l'intérieur, que c'est son histoire. Rencontre avec cet esprit brillant et humaniste à l'éternelle moustache et aux yeux azur, véritable puits de culture économique, politique, philosophique, et qui connut mille vies, polytechnicien, ex-militant maoïste, organisateur des marches sur le Larzac, eurodéputé Vert, auteur de polars comme d'essais économiques alertes, dont le stimulant Green Deal.
2012-10-06 - Weronika Zarachowicz - Télérama
Introduction
1. Le modèle libéral-productiviste
Un taylorisme répressif
Un " régime en retombée " et une économie de dette
Le néolibéralisme
La Chinamérique
2. La crise du modèle libéral-productiviste
Les explications dominantes : une grave crise financière
L'émergence de la contrainte de soutenabilité
L'éclatement des crises écologiques
Le renversement du monde et le grand retour de la Chine
L'état où nous en sommes (début 2012)
3. Feuille de route pour un Green Deal
Régulation financière et budgétaire : nécessaire, mais pas suffisante
La supervision financière
La supervision budgétaire - Un budget fédéral pour l'Europe
Un repartage de la valeur ajoutée
Un régime tiré par l'investissement vert
Un paradigme intensif en emplois
Un régime international coopératif
Effacer le passé, financer l'avenir
La crise anthropologique et l'économie sociale et solidaire
Les excès de l'individuation - L'économie sociale et solidaire
4. La grande transition
Le mouvement social vers la transition
La transition alimentaire
Oui, la Terre peut nourrir les Terriens - Le potentiel français - De la possibilité à la réalisation
La transition énergétique
Des risques de mieux en mieux mesurés - Des exemples en Europe - Le cas de la France - Les instruments de la transition
De la planification écologique
5. Le difficile chemin du Green Deal
La terrible expérience politique de la Grande Dépression
Obstacles à un tournant vert
Le saut difficile vers la coopération - Les intérêts dominants - Les réticences populaires
6. La conquête de la majorité
1. D'abord et avant tout, être clair sur le projet
2. Promouvoir la coopération supranationale et spécialement le fédéralisme européen
3. Combiner les réformes institutionnelles et les améliorations substantielles
4. Utiliser l'Apocalypse avec modération
5. Mettre en lumière le coût du " non-changement "
6. Mobiliser Pigou avec sagesse
7. Combiner mesures sociales et environnementales
8. Présenter l'intérêt commun comme conforme aux intérêts individuels
9. Être équitable dans l'effort
10. Pas de larmes, mais des roses !
Conclusion.