En Afrique, aux Antilles et sur le continent américain, les esclaves ont été des acteurs majeurs et pourtant largement mésestimés de l'histoire de l'esclavage. À rebours de l'historiographie dominante, ce livre, qui repose notamment sur les nombreux récits de vie qu'ils ont écrits ou transmis, s'attache ainsi à montrer qu'ils ont contribué à l'évolution culturelle et sociale des côtes et de l'arrière pays africains, à la création de nouvelles sociétés métissées aux Amériques, ou à l'invention de formes de résistance dont la révolution haïtienne marqua le sommet.
Il décrit également des épisodes peu connus : le développement, après la " découverte " du Brésil en 1500, de la traite " en droiture " dans l'Atlantique sud, phénomène qui concerna presque la moitié des esclaves déportés ; ou encore la généralisation de l'esclavage interne précolonial dans les sociétés africaines au XIXe siècle, alors même que, paradoxalement, le processus des abolitions l'emportait dans les Amériques.
En restituant l'intensité des échanges noués entre l'Afrique et les Amériques, notamment du point de vue des esclaves, et sans négliger le rôle qu'y ont tenu les Européens, Être esclave offre une synthèse particulièrement efficace des apports les plus récents de l'historiographie internationale sur l'esclavage.
Catherine Coquery-Vidrovitch, née en 1935, est une historienne spécialiste de l'Afrique, professeur émérite de l'université Paris-Diderot. Elle est l'auteure de nombreux ouvrages, dont, à La Découverte, Petite histoire de l'Afrique. L'Afrique au sud du Sahara de la préhistoire à nos jours (2010) et Être esclave. Afrique-Amériques, XVe-XIXe siècle (avec Éric Mesnard, 2013).
Éric Mesnard enseigne l'histoire et la géographie à l'université Paris-Est Créteil (ESPE de l'académie de Créteil). Il travaille depuis de nombreuses années sur l'histoire des Antilles et de l'esclavage colonial et est l'auteur de plusieurs articles et livres sur la question.
2013-12-01 - Igor Martinache - Alternatives économiques
Le livre des historiens français Catherine Coquery-Vidrovitch et Eric Mesnard, Etre esclave. Afrique-Amérique, XVe-XIXe siècle, [...] élargit la focale dans le temps et dans l'espace, prenant grand soin de présenter la traite dite " en droiture ", celle qui se déroule majoritairement dans l'Atlantique sud, souvent moins bien connue. L'homme ou la femme esclave repositionnés au coeur de la recherche permettent de mettre en lumière la complexité des échanges culturels et leur évolution au fil des siècles.
2013-12-13 - Julie Clarini - Le Monde des Livres
Catherine Coquery-Vidrovitch et Eric Mesnard analysent la migration dans sa globalité, de l'intérieur du continent africain jusqu'aux plantations américaines. Leur objectif est de réintroduire les acteurs africains en tant que partenaires à part entière du système atlantique. La grande majorité fut victime de la traite, mais certains furent aussi les pourvoyeurs des Européens en êtres humains. Les auteurs s'intéressent en particulier à l'un des moins connus de ces intermédiaires, le marchand africain, dont certains, devenus captifs à leur tour, ont laissé des récits de leur vie..
2013-12-19 - Jean-Yves Grenier - Libération
Mesnard et Coquery-Vidrovitch ont l'immense mérite de s'en prendre, avec sérieux, à des idées reçues qui ont la vie dure.
2014-01-19 - Nicolas Michel - Jeune Afrique supplément
Ce livre comble une lacune : l'étude des relations directes entre Afrique et Amérique. La traite dite " en droiture ", caractéristique de l'Atlantique sud, a concerné presque la moitié des esclaves transportés. En analysant la totalité de la chaîne, de l'intérieur du continent noir aux plantations, les auteurs éclairent " une partie du trafic négrier interne à l'Afrique, dimension du commerce triangulaire entre l'Europe, l'Afrique et l'Amérique jusqu'ici occultée", comme le souligne la préface de l'historien sénégalais Ibrahima Thioub. L'identification de ce nouvel acteur, l'Afrique, non comme victime mais comme partenaire du commerce d'êtres humains, est un "pari délicat", admet-il, "car il suppose de s'émanciper des mémoires, victimaires ou non repentantes, en compétition". Les groupes dominants des sociétés africaines avaient "conservé une autonomie qui leur a permis de négocier, souvent avantageusement, les modalités de la traite dans leur espace de souveraineté". Le livre se penche aussi sur la résistance des véritables victimes, les communautés paysannes.
2014-02-01 - Augusta Conchiglia - Le Monde diplomatique
Selon l'expression désormais consacrée, Catherine Coquery-Vidrovitch et Éric Mesnard ont voulu écrire une histoire de l'esclavage " à parts égales " entre ses acteurs européens, américains et africains. Rappelant à quel point l'histoire de l'esclavage est parasitée par les revendications mémorielles, les deux historiens entendent " remettre en cause la perspective dominante de l'historiographie de la traite atlantique des esclaves ". Cela implique de réévaluer le rôle joué par les Africains eux-mêmes, en particulier les négriers qui approvisionnaient les navires européens le long de la côte ouest-africaine, intégrant ainsi tout l'arrière-pays au système de la traite. Plus que des victimes impuissantes, ces Africains-là furent des partenaires du commerce d'esclaves. Celui-ci était d'ailleurs considéré comme normal, puisque légal et autorisé. Comme le rappellent à juste titre les auteurs, " nous appréhenderons mieux cette histoire quand nous cesserons de projeter sur ce passé nos affects et nos jugements du présent ".
2014-04-01 - Thierry Jobard - Sciences Humaines
Préface, par Ibrahima Thioub
Introduction. Les Africains dans le monde atlantique
1. L'esclavage dans les sociétés africaines, une histoire ancienne
L'ancienneté de l'esclavage - Que voulait dire être esclave en Afrique ?
2. Les traites orientales et les traites internes
L'islam et la traite des noirs - La traite transsaharienne - La traite vers l'océan Indien - Les itinéraires africains. Récits de vie - Ce qu'ils nous apprennent - La traite africaine des femmes
3. La culture luso-africaine (XVe-XVIIe siècle)
Le croisement des cultures - L'importance de l'or - Le rôle fondateur des îles du Cap Vert - L'économie de plantation - Le royaume du Kongo et les Portugais à Loanda- La côte sud-africaine
4. Le Grand Passage. De l'esclave en Afrique à l'esclave en Amérique (XVIe-XVIIe siècle)
La transformation de l'esclavage en Afrique - La traversée de l'Atlantique vers le " Nouveau Monde "
5. Le " Midldle Passage " ou " Passage du milieu " (seconde moitié du XVIIe-première moitié du XIXe siècle)
L'embarquement - La terrible traversée - Données démographiques d'un crime contre l'humanité
6. L'esclavage en Amérique (fin du XVIIe-première moitié du XIXe siècle)
Être esclave dans les " îles à sucre " - Être esclave dans les colonies britanniques continentales puis aux États-Unis d'Amérique
7. Les résistances d'esclaves
Révoltes en Afrique - Traite et révolte - Résistances en Amérique
8. La créolisation en Afrique
Les apports réciproques - Des esclaves africains grands voyageurs - Les Luso-Africains - Les Afro-Brésiliens - Loanda, ville métisse - La médiation luso-africaine et luso-brésilienne - Les Créoles et le rôle des femmes - Le style de la maison dite " coloniale "
9. La créolisation en Amérique
L'émergence d'une nouvelle culture - L'émergence d'un nouveau groupe social : les " libres de couleur " 10. Les abolitions en Amérique (fin du XVIIIe-XIXe siècle)
De l'antiesclavagisme à l'abolitionnisme - La Révolution aux Caraïbes : le tournant haïtien - Les abolitions... et après ?
11. L'esclavage intégré en Afrique (fin du XVIIIe-XIXe siècle)
L'essor de l'esclavage interne - L'Afrique occidentale - L'essor des royaumes négriers - Les États de conquête - Les esclaves de contrebande - L'esclavage chez les seigneurs de guerre - La réactivation de la traite transsaharienne - L'Afrique équatoriale - L'Afrique portugaise - La colonisation zanzibarite - Les femmes esclaves - La genèse du racisme anti-noir
Conclusion
Annexe
Constitution haïtienne du 20 mai 1805 (extraits)
Éléments de bibliographie.