La France s'est construite autour de son État, et la période contemporaine ne fait pas exception. Tout au long de la Troisième République, et bien sûr sous Vichy, l'appareil d'État se renforce. L'administration joue ainsi un rôle décisif dans la mise en place des principales institutions sociales et politiques de la France républicaine. Mais cette administration est-elle pour autant " républicaine " ? Autrement dit, qui les fonctionnaires entendent-ils servir en priorité : la Nation, la République, l'État ? La réponse n'est évidemment pas la même pour les conseillers d'État et pour les inspecteurs de la Sûreté, pour les officiers et pour les instituteurs, pour les magistrats et pour les ingénieurs des Ponts et Chaussées. Elle n'est pas non plus la même pour la République laïque du début du XXe siècle et pour l'État en crise du milieu des années trente. À partir d'une quarantaine de contributions de chercheurs (historiens, juristes, politistes), cet ouvrage aborde un volet indispensable à la connaissance des serviteurs de l'État au cours d'une période fondamentale de l'histoire de la France contemporaine. Par-delà les deux crises majeures que sont l'affaire Dreyfus et l'Occupation, on y trouvera à la fois une analyse de la machinerie de l'État et une étude des représentations que se font les fonctionnaires de leur place dans l'État, la société, la nation. Compétence, autonomie, obéissance, impossible réforme : le lecteur d'aujourd'hui retrouvera dans cet ouvrage bien des débats toujours d'actualité au sein de l'appareil d'État en France. Celui-ci est en effet l'héritier d'une longue histoire, relevant pleinement à ce titre d'une approche politique - tant la question des pratiques d'État en République est indissociable des enjeux même de la démocratie.
Marc Olivier Baruch, Docteur en histoire, a soutenu une thèse sur l'administration française entre 1940 et 1944. Ancien élève de l'École polytechnique et de l'École nationale d'administration, il est administrateur civil au ministère de la Culture.
Historien de la France contemporaine et des sociétés démocratiques, Vincent Duclert est chercheur titulaire et ancien directeur du CESPRA (EHESS-CNRS). Il est spécialiste des politiques de l'État, des engagements intellectuels et des processus génocidaires. Il est à la tête de deux programmes d'édition d'œuvres (aux Belles Lettres), celles d'Elie Halévy (avec Marie Scot) et celles du capitaine Dreyfus (avec Philippe Oriol), et a contribué avec deux tomes aux Œuvres de Jean Jaurès (Fayard).
Il a dirigé le Dictionnaire critique de la République (avec Christophe Prochasson, Flammarion, 2002). Il a publié les biographies d'Alfred Dreyfus (Fayard, 2006 ; rééd. Pluriel, 2016) et de Jaurès (avec Gilles Candar, Fayard, 2014 ; rééd. Pluriel, 2024), il a écrit La République imaginée, 1870-1914 (Belin, 2010 ; rééd. Folio, 2021). Il a présidé le rapport La France, le Rwanda et le génocide des Tutsi (Armand Colin, 2021). Il est aussi l'auteur, notamment, de La France face au génocide des Arméniens, du milieu du XIXe siècle à nos jours. Une nation impériale et le devoir d'humanité (Fayard, 2015) et La France face au génocide des Tutsi. Le grand scandale de la Ve République (Tallandier, 2024).
Aux éditions La Découverte, il a édité Les Preuves de Jean Jaurès (1998), dirigé Avenirs et avant-gardes en France, XIXe-XXe siècles (avec Rémi Fabre et Patrick Fridenson, 1999), Serviteurs de l'État (avec Marc Olivier Baruch, 2000) et Le Gouvernement de la recherche (avec Alain Chatriot, 2006). Il est l'auteur de L'Affaire Dreyfus (" Repères ") et a co-écrit Les Archives (avec Sophie Cœuré , " Repères ").
"Où s'exprime et s'exerce véritablement l'action politique ? Dans les hautes instances ou dans les rouages obscurs de la machinerie d'Etat ? Les responsabilités, bien sûr, sont partagées, mais l'historiographie n'a jusqu'à présent accordé que très peu d'attention aux acteurs administratifs, à leur pratique ou à leur conceptions politiques du service public. D'où l'intérêt de l'ouvrage dirigé par Marc Olivier Baruch et Vincent Duclert, dans lequel une quarantaine d'historiens ont accepté de plonger dans la cale de l'Etat pour tenter d'évaluer la profondeur de l'attachement ou de la culture républicaine des fonctionnaires des années 1875-1945 (...) Soulignant l'illusion ou l'échec d'un Etat républicain fondé sur des principes d'éthique politique communs, ce livre montre à la fois l'autonomisation croissante de l'appareil administratif et la complexité des relations qui lient l'individu à ses institutions de tutelle. Il témoigne en ce sens de la pertinence d'une histoire administratif renouvelée(...) "
LIBERATION
2024-11-21 - PRESSE
iIntroduction - Une histoire politique de l'administration française (1875-1945), Marc Olivier Baruch - I. Politiques de l'État en République - La légitimation par le droit, Dominique Gros - L'affaire Dreyfus, l'État et la République, Vincent Duclert - Penser l'État en Grande-Bretagne, Cécile Laborde - Qui produit la loi ? Espace(s) juridique(s), espace(s) politique(s) avant la Première Guerre mondiale, Martine Kaluszynski - Le Conseil d'État au tournant du siècle, raison politique et conscience légale de la République, Rachel Vanneuville - Gouvernement et Parlement dans l'entre-deux-guerres, Nicolas Roussellier - Les historiens au service de l'État ? (1871-1940), Olivier Dumoulin - La République a-t-elle besoin d'espions ?, Alain Dewerpe - La " République maçonne " ?, Vincent Borel - La République contre les catholiques ?, Patrick Cabanel - L'égalité dans la différence : les paradoxes de la République (1880-1940), Florence Rochefort - Contre le citoyen, pour la République, par le fonctionnaire : l'association, une idéologie coloniale républicaine, Damien Deschamps - Les syndicats et le statut des fonctionnaires, Jeanne Siwek-Pouydesseau - II. Une République administrative ? - L'affaire Dreyfus comme conflit entre administrations, Bertrand Joly - De la suppression des préfets : chronique d'une mort ajournée, Vida Azimi - Les officiers et l'État (1900-1940), Olivier Forcade - Le service secret de l'État : la part des militaires (1870-1945), Sébastien Laurent - Polices et policiers, Igor Charras - Les " Brigades du tigre " : " La seule police qu'une démocratie puisse avouer " ? Retour sur un mythe, Jean-Marc Berlière - L'insaisissable modèle : l'identité brouillée de la justice républicaine (1880-1940), Frédéric Chauvaud - Entre service de l'État et besoins du marché, les inspecteurs des Finances (1918-1939), Nathalie Carré de Malberg - Les instituteurs entre État-pédagogue et État-patron, des lois républicaines aux lendemains de la Grande Guerre, Jean-François Chanet - Une politique pour les archives (1880-1940), Françoise Hildesheimer - Les hauts fonctionnaires du Conseil d'État au Conseil national économique : la construction d'une institution d'État, Alain Chatriot - III. Un modèle en question - La police entre ordre républicain et préjugés au tournant du siècle, Pierre Birnbaum - Des " fonctionnaires temporaires " durant la Grande Guerre, Fabienne Bock - L'État face à la contestation communiste, Frédéric Monier - Le modèle portugais, Emmanuel Hurault - La doctrine publiciste française face au national-socialisme, Marc Loiselle - L'influence de la Guerre d'Espagne, Émile Témime - Le Conseil national économique, Jean-Pierre Le Crom - Du privé au public : des technocrates en quête d'un État rationnel et à la conquête de l'État républicain dans la France des années trente, Olivier Dard - Pour la Patrie, les Sciences, la Gloire... et le Maréchal ? L'École polytechnique et la réforme Berthelot (1941), Vincent Guigueno - Vichy et la tradition de l'étatisation de la justice : histoire d'un demi-succès, Alain Bancaud - Vichy, les fonctionnaires et la République, Mar Olivier Baruch - La France Libre et l'État républicain, Jean-Louis Crémieux-Brilhac - Bibliographie sélective, Marc Olivier Baruch, Alain Chatriot, Vincent Duclert - Liste des auteurs.