N'en déplaise aux Cassandre et aux incrédules, le livre imprimé garde bien des ressources. Ce numéro propose une cartographie lucide de la situation complexe, inconfortable, qui lui est faite en 2009. "Livre", "écrivain","éditeur"? Comment la nouvelle donne technologique (le Web surtout) influe-t-elle sur le commerce, au sens large, que nous entretenons avec l'écrit? Ce dossier multiplie les angles d'attaque et fait appel aux intelligences de tous bords: des spécialistes de la lecture, mais aussi des sociologues, des économistes,des artistes... Ceci en quatre temps: le livre à l'heure du numérique;la politique et l'économie du livre; comment le livre, central naguère, menace de glisser à la périphérie du symbolique;enfin,le dialogue écrit/images – en particulier au cinéma.
Les Cahiers de la librairie se veulent un outil de réflexion du Syndicat de la Librairie Française sur la profession de libraire et son environnement. Ont notamment été publiés, entre autres, un numéro sur les 25 ans de la loi Lang, sur la librairie en Europe, l'édition et la librairie indépendantes, ou le livre comme exception culturelle. En 2008, La Découverte en a publié un hors série : Accueillir le numérique ? Une mutation pour la librairie et le commerce du livre.
Toute dissertation sur l'avenir du livre et de l'imprimé se présente aujourd'hui comme la chronique d'une mort annoncée. À tel point que le sémiologue Umberto Eco "ne supporte plus la question", rappelle l'historien Roger Chartier, en ouverture du nouvel opus des Cahiers de la librairie. Jamais, pourtant, autant d'ouvrage n'ont été vendus, lus et produits dans toute l'histoire de l'humanité. Mais, "les évidences statistiques ne suffisent pas à apaiser les anxiétés", poursuit Roger Chatrier Après des siècles de galaxie Gutenberg, le livre serait-il absorbé par le trou noir du cyberespace ? Rien n'est moins sûr, car les écrans d'aujourd'hui ne font pas écran à l'écrit. Multipliant les textes et les liens, ils sont même devenus "des écrans d'écrits" assure l'historien. Inutile donc de céder à la panique du numérique. [...] Alors le livre restera-t-il à la page, ou bien à la marge ? Au moment où le Salon du livre se déroule sur fond de crise, ce numéro instructif et combatif, coédité par le Syndicat de la librairie française, peut se targuer d'être la chronique d'une mort dénoncée.
2009-03-16 - Nicolas Truong - Le Monde