Si le printemps 2020 aura bien sûr été marqué par la pandémie de coronavirus, il aura aussi été traversé sur le plan politique et médiatique par des images de protestations contre les violences policières, doublées de dénonciation du racisme. Depuis les rassemblements Black Lives Matter et les émeutes suivant la mort de George Floyd aux États-Unis, jusqu'aux manifestations du comité La vérité pour Adama en France, sur les écrans de télévision comme sur les plateformes de réseaux sociaux, des expressions telles que " racisme d'État ", " privilège blanc ", et plus largement celles de " racisation " ou " racialisation ", ont pris une place jusqu'ici inédite dans l'espace public.
Depuis une vingtaine d'année déjà, ces notions et concepts, produits de l'univers académique mais bien souvent dans des zones de contact avec les mondes de l'activisme et du militantisme, connaissent de fait un emploi croissant par les sciences sociales. Parce que la " question raciale " constitue ainsi une entrée de plus en plus fréquente pour penser la société, la revue Réseaux a précisément souhaité consacrer un dossier à sa mobilisation pour analyser les médias.
Les articles réunis dans ce dossier, en mettant à jour des représentations médiatiques contribuant à altériser certains individus ou groupes sociaux en raison de leurs supposées origines communes ou mêmes couleurs de peau, prolongent ici des travaux qui, autrefois consacrés à l'image des " immigrés " ou des habitants des " banlieues ", n'avaient pas abordé de façon aussi frontale les processus de racialisation. Et ils ouvrent également des voies encore plus originales pour la recherche française, en comparaison notamment de traditions plus établies aux États-Unis. Car ces différents articles, en explorant les modalités de production et les positionnements professionnels, au sein des entreprises de médias et plus largement des secteurs d'activité concernés, aident à mieux comprendre comment des biais racialisants peuvent être véhiculés - ou contrecarrés - par les médias.
La revue Réseaux. Communication - Technologie - Société, créée en 1982 par Patrice Flichy et Paul Beaud, s'intéresse à l'ensemble du champ de la communication en s'axant tout particulièrement sur les télécommunications. Les mass-médias et l'informatique sont également abordés. La télévision a notamment constitué le thème d'un nombre important de numéros. La réflexion sur la communication étant à l'origine de nombreux débats au sein des sciences sociales, des numéros sont aussi consacrés à des questions d'ordre théorique ou méthodologique. Bien qu'orienté plutôt vers la sociologie, Réseaux souhaite traiter les problèmes de la communication de façon pluridisciplinaire.
Pour s'abonner à la revue, rendez-vous sur le site Cairn.info
2021-02-02 - Lien Social
Les auteurs
Présentation
La médiatisation analysée au prisme de la racialisation Antériorités états-uniennes et tendances de la recherche française,
par Franck Rebillard et Camille Noûs
Dossier : " Médias et racialisation "
Le " racisme anti-blancs " Carrière d'un problème public dans la presse quotidienne nationale française,
par Réihane Merazka
La critique face à l'autre Étude de la réception de
Bande de filles par la critique cinématographique française,
par Evélia Mayenga
La représentation de l'autre Enquête sur les conditions de production de personnages racisés dans une websérie LGBT,
par Déborah Gay
Black to Detroit. Aux origines médiatiques de la techno,
par Alia Benabdellah
Varia
Les réseaux socionumériques ont-ils changé les règles du jeu pour les rappeuses ?
par Keivan Djavadzadeh
Notes de lecture
Simon Dawes,
British Broadcasting and the Public-Private Dichotomy: Neoliberalism,
Citizenship and the Public Sphere, Cham, Palgrave Macmillan, 2017, xiv-239 p. Tom Mills,
The BBC: Myth of a Public Service, London, Verso, 2016, 266 p.
par Gaël Villeneuve
Anne-Sophie Béliard,
S'il te plaît, dessine-moi une série... Contributions des internautes et séries télévisées, Paris, Presse des Mines, 2016, 168 p.
par Clément Combes
Alexandre Rios-Bordes,
Les savoirs de l'ombre : la surveillance militaire des populations aux États-Unis (1900-1941), Paris, Éditions de l'EHESS, coll. " En temps et lieux ", 2018, 349 p.
par Émilien Julliard
Résumés/Abstracts.