Yorkshire, labrador, bichon à poil frisé, husky, pitbull ou rottweiler, la population canine française s'élevait à 7,42 millions d'individus en 2012. Pourquoi tant de chiens ? Quelles étranges relations entretient-on avec ces compagnons à poil ? Et, surtout, que révèlent-elles sur les humains qui les nouent ?
" Tel maître, tel chien ", dit l'adage populaire. Christophe Blanchard reprend la maxime à son compte : à partir de différents binômes maîtres/chiens, de la mémère à caniche au punk à chien, il s'agit en réalité pour lui de croquer la société française contemporaine.
Dans une vie de chien, tout commence avec l'enfance, celle des jeunes maîtres et de leurs fidèles toutous, dont la fiction a ossifié les archétypes, qu'ils s'appellent Lassie, Rintintin ou Milou. Certains finiront dans des cimetières canins, dont on peut étudier la symbolique et les épitaphes.
Mais, au-delà de ce compagnonnage biographique et affectif, le quadrupède est aussi et surtout devenu un produit de consommation courante. Il existe tout un marché du chien dont on peut suivre les ramifications économiques.
Si avoir un chien est facile, avoir du chien n'est pas à la portée du tout-venant : le sociologue se livre ainsi à une étude comparée des chiens de luxe – triomphe de l'inutilité canine – et des chiens de SDF – revanche des corniauds et des bâtards. Quand la question canine croise de manière inattendue celle de la classe et de la race...
2014-11-01 - 30 millions d'amis
Pas de Youki sans mémère, de Milou sans Tintin, ni de punks sans chiens. Le sociologue Christophe Blanchard explore l'adage "tel maître, tel chiens" avec brio (non ce n'est pas le nom de son pastron russel). Alors que la population canine française compte 7,42 millions d'individus, que nous apprend-elle sur ceux qui tiennent la laisse ? D'abord, que l'homme attend avant tout de son meilleur ami de la compagnie. Les chiens de garde, de chasse, ou les limiers ne forment désormais qu'une minorité de l'espèce. Mais aussi, toujours, de la distinction sociale. Les compagnons à quatre pattes sont surtout "un but et une raison de vivre" pour les personnes à la rue que l'auteur a rencontrées pour sa thèse. Beaucoup témoignent avoir renoncé à des solutions de logement parce que les services sociaux leur imposaient de se séparer de leurs cabots. Entre coups de gueule et anecdotes poilantes, Christophe Blanchard montre que le rejet des chiens - les bâtards des SDF ou les rottweilers de la "racaille" - recèle souvent des peurs de classes, voire de races, inhumaines.
2014-11-01 - Simon Barthélémy - Terra Eco
" Yorkshire, labrador, bichon à poil frisé, husky, pitbull ou rottweiller, la population canine française dépasse en France les 7 millions d'individus. " C'est, écrit Christophe Blanchard, le " triomphe de l'animal de compagnie ". Il n'en a pourtant pas toujours été ainsi. Historiquement, différentes tâches ont été confiées aux chiens : garde, chasse, traction. Mais aujourd'hui, " le chien s'est complètement métamorphosé. Il est exclusivement un artefact de luxe et d'agrément dans une société devenue suffisamment prospère pour ne plus avoir à compter sur sa force de travail. Membre à part entière de la famille, il a cessé d'être un domestique pour entrer dans le cénacle des animaux de compagnie ", explique le sociologue. La place du chien évolue, et un véritable marché cynophile s'est mis en place. " Le bien de consommation "chien' possède (...) une valeur commerciale, qui varie suivant les races, les époques, les pays et les modes. " Le phénomène atteint des sommets : un véritable délire semble entourer l'animal de compagnie. Depuis quelques années, des hôtels pour chien voient le jour. En 2012, un D Pet Hotel a ouvert en plein cœur de Manhattan : 50 chambres coûtant de 79 à 200 dollars la journée. Sur place : télévision à écran plat, lecteur DVD, parc de jeux et même salon de manucure pour griffes. Au Brésil, ce sont les Love Hotels, sorte de maisons de passe pour la gent canine, qui fleurissent. Pour une cinquantaine de dollars, les maîtres peuvent ainsi laisser s'ébattre leur " progéniture " canine en toute discrétion, sous l'œil averti des tenanciers du lieu, biologistes ou vétérinaires. Les pratiques évoquées dans ce petit ouvrage sont nombreuses et diverses. L'une d'entre elles semble plus particulièrement chère à son auteur. La relation fusionnelle qu'entretient avec le canidé la frange la plus précarisée de la population fait l'objet d'une analyse plus détaillée. Dans la rue, C. Blanchard en a été le témoin, le chien peut retrouver un rôle essentiel : il est, pour certains routards, SDF et autres précaires, un " compagnon naturel qui leur permet de survivre ".
2014-11-01 - Marie Deschamps - Sciences Humaines
Ils sont souvent désignés par l'appellation péjorative " punk à chien ". Ce sont simplement des propriétaires de chien vivant dans la rue. La statistique publique déjà bien insuffisante sur les sans-domicile-fixe l'est encore plus sur ceux qui possèdent un compagnon à quatre pattes. Christophe Blanchard, sociologue et maître-chien, spécialiste de la relation homme-animal, est l'un des rares à avoir travaillé sur ces binômes de la rue. Ses enquêtes de terrain dressent le portrait de propriétaires plutôt jeunes, entre 18 et 35 ans, en relative bonne santé et qui, grâce à leur animal, ne sont pas complètement coupés de la société.
2014-11-18 - Catherine Rollot - Le Monde
Introduction
Brève histoire du chien, ou comment Médor est devenu un animal de compagnie
Préhistoire du chien
Un travail de chien
Le triomphe de l'animal de compagnie
Le chien-marchandise
Un produit " courant " de consommation
Bienvenue chez les
pet feeders
Parce qu'ils le valent bien
L'art du dressage
Du chenil à l'hôtel
" Le meilleur ami de l'homme "
Chien joujou et enfant-maître
Le maître comme parent
Le chien comme béquille sociale
Médiations animales
La mort de Médor
Tel maître, tel chien ?
Dis-moi comment ton chien s'appelle et je te dirai qui tu es
L'homme à tête de chien
La distinction par l'animal
Les chiens ont-ils une identité nationale ?
La belle et le clochard
Les chiens du
Titanic
Le fin des " aristochiens " ?
Les chiens de la zone : un sous-prolétariat à quatre pattes
La revanche des corniauds et des bâtards
Le chien, une question politique ?
" Trottoir pas crottoir "
" Moi, j'attends dehors "
De si grandes dents : la question de la morsure
La menace des hommes-chiens
Chiennes de vies
Pauvres et chiens comme objets de charité
Folles rumeurs et délit de sale gueule
Les chiens de SDF, des cabots mal élevés ?
Viser le chien pour mieux exclure le maître
Le cas " Sonia " : une victime expiatoire de la crise mimétique
Aide sociale et exclusion par le chien
Conclusion.