Il n'est peut-être pas de réforme plus urgente que celle de l'Université. Mais pas de réforme non plus qui semble aussi irrémédiablement vouée à l'échec. N'est-ce pas là l'effet du profond fossé qui s'est creusé entre l'idéal sur lequel s'est édifié l'Université et sa réalité actuelle ? L'idéal était celui d'un lieu délivrant une culture désintéressée et un savoir ayant valeur universelle. La réalité est aujourd'hui celle d'un savoir " utilitaire ", dont on ne retient que l'efficacité pragmatique. S'abolit ainsi la différence entre science et technique, nature et société, être et devoir être. Si l'on veut une vraie réforme de l'Université, on ne fera donc pas l'économie d'une réflexion épistémologique approfondie sur cet écart béant entre l'idéal et la réalité. Tel est le propos de cet ouvrage, où l'auteur analyse le mécanisme de cette confusion du pouvoir et du savoir dans le savoir-faire. Les essais ici réunis visent à susciter une prise de conscience, nécessaire à la reconstruction raisonnée des sciences humaines et sociales comme disciplines de réflexion et de formation. Ce qu'elles étaient à l'origine, lorsqu'elles inscrivaient leur projet de connaissance et de formation dans le cadre des humanités. C'est cet esprit et cette dynamique qui doivent et qui peuvent, démontre l'auteur, être restaurés, tout en les adaptant aux exigences de notre époque. Michel Freitag est le sociologue et le philosophe par excellence de la société postmoderne. On connaît peu de réflexions contemporaines qui atteignent cette cohérence et cette puissance réflexive : on croit parfois lire un habermas dont l'inspiration serait plus hégélienne que kantienne. En dehors d'articles publiés dans la Revue du MAUSS, son oeuvre est pourtant mal connue en France : cette coédition franco-québécoise permet de réparer cet oubli et de présenter au lecteur français, à partir d'une analyse aiguë de la crise de l'Université, les principaux moments d'une théorie systématique de la postmodernité.
Michel Freitag, né en Suisse à La Chaux-de-Fond, ancien chercheur au CNRS, est depuis 1971 professeur de sociologie à l'Université du Québec à Montréal. Animateur au Québec du " Groupe d'études sur la postmodernité ", il est également le directeur de la revue Société. Outre de nombreux et importants articles, il est notamment l'auteur de Dialectique et société (L'Age d'Homme/Saint-Martin, Lausanne/Montréal, 1986).
Remerciements
Introduction
La gestion technocratique du social
Chapitre 1. Le naufrage de l'université
Chapitre II. La crise des sciences sociales et la question de la normativité
Chapitre III. La dissolution de la société dans le " social "
Chapitre IV. La société informatique et le respect des formes
Chapitre V. Philosophie et sciences humaines
Réflexions sur la violence de la méthode et le respect de la société
Bibliographie.