Un taliban met le feu à une pellicule photographique, tout en permettant à un reporter de photographier la scène. Cette scène révèle la relation ambiguë que certaines civilisations entretiennent avec l'image. Cette haine affichée des images n'est pas seulement le fait des " fous de Dieu " destructeurs des bouddhas de Bahmian. Les exemples ne manquent pas en effet, dans l'histoire des sociétés, de condamnation des images et, d'une manière plus générale, des représentations : le rejet de la fiction et de l'imitation dans une partie de la tradition philosophique occidentale (Platon, Rousseau) fait écho à Calvin condamnant l'adoration des reliques, ou aux cisterciens qui considéraient les vitraux comme l'expression d'une luxure décadente. Les images occupent une place centrale dans la conscience et l'identité sociales, politiques et culturelles des sociétés humaines, qu'elles soient mimétiques, symboliques ou discursives. Dans ce livre, Jack Goody explore les rapports complexes et ambivalents qu'entretiennent les images avec la religion, la politique et la culture, dans les sociétés orales, comme dans celles de l'écrit. Il cherche à montrer ce qu'elles révèlent sur les sociétés dans lesquelles elles apparaissent ou disparaissent. À partir d'une analyse comparée des cultures orientale, occidentale et africaine depuis deux mille ans, il explore notamment l'irrégulière répartition géographique et temporelle des images dans les sociétés humaines. Empruntant ses exemples à un large contexte culturel (la sculpture africaine Mangbetu, le théâtre médiéval, l'art classique grec, les statues de Bouddha ou le roman anglais), il met en lumière ce qui se dissimule derrière leur absence ou leur suppression.
Jack Goody (1919-2015) était membre du St John's College de Cambridge et a été professeur honoraire d'anthropologie sociale à l'université de Cambridge de 1973 à 1985. Il a écrit de nombreux ouvrages sur les cultures orale et écrite, la famille et le mariage et la cuisine. Il est notamment l'auteur de Entre l'oralité et l'écriture (PUF, 1994) La Culture des fleurs (Seuil, 1994) et L'Orient en Occident (Seuil, 1999) et L'Islam en Europe (La Découverte, 2004,2006).
" Jack Goody est un comparatiste érudit et audacieux doublé d'un insatiable et infatigable curieux. Son rapport au savoir est si jubilatoire que le lecteur, séduit, est un peu étourdi. "
LE MONDE DES LIVRES
" Pourquoi, quelle que soit la culture de nos jours comme dans le passé lointain, qu'il y règne l'écriture ou qu'elle soit orale, en Asie, en Europe et en Afrique , ne cesse-t-on de s'interroger sur la nature de la représentation ? Comment se fait-il que certaines sociétés peuvent avoir un rapport non problématique avec leurs images, alors que les mêmes, ou d'autres, en viennent à les rejeter parfois violemment, à différents moments de leur histoire ? C'est à cette question à tiroirs qu'essaie de répondre l'anthropologue britannique Jack Goody dans la Peur de la représentation. "
LIBÉRATION
" La peur des représentations a le mérite de nous rappeler à chaque page que nous faisons dorénavant partie d'un monde où plus rien ne saurait nous rester étranger. Mais pourquoi en ce début de XXIe siècle faut-il encore attendre six années pour qu'un livre de cette portée traverse la Manche? "
LA QUINZAINE LITTERAIRE
" L'anthropologue Jack Goody, spécialiste des cultures orales et écrites et de l'évolution de la famille, met en oeuvre sa méthode comparative pour éclairer les relations, ô combien ambivalentes et peu rationnelles, des sociétés avec les images. L'auteur introduit la relativité là où d'autres avant lui claironnaient des certitudes absolues : ainsi, la même religion, mais à des époques différentes, peut adopter une attitude contraire face à la représentation de son Dieu... Les notions occidentales d'histoire et d'universalité sont sérieusement ébranlées. "
LE MONDE DIPLOMATIQUE
" Le néophyte pensera sans doute qu'il s'agit là d'un sujet marginal. La lecture de ce livre le détrompera. Il faut saluer cette entreprise originale, fort érudite, qui éclaire des comportements contemporains que l'on aurait tôt fait de qualifier de barbares. Cette analyse démontre que notre propre histoire n'est pas si éloignée de ces tendances. "
BULLETIN CRITIQUE DU LIVRE EN FRANÇAIS
" Remarquable essai sociologique. "
ART SUD
2024-11-26 - PRESSE
Préface à l'édition française (2003)
Remerciements
1. Représentations et contradictions cognitives
Absence
Objections
L'écrit et l'oral
Changement et dilemmes cognitifs
Puritanisme
Ambivalence
Note finale sur la représentation
2. Icônes et iconoclasme en Afrique ? Absence et ambivalence
Doutes généraux sur les icônes
3. Reliques et contradiction cognitive des dépouilles mortelles et des aspirations à l'immortalité
Pèlerinage
Miracles
Reliques, christianisme et continuité
Les reliques dans d'autres religions universelles
Les reliques dans les cultures orales
4. Théâtre, rites et représentations de l'autre
5. Mythe : réflexions sur les inégalités de distribution
Mythe et mythologie : récitation et savoir sacré
L'art verbal et ses genres
Des contes populaires comme fiction
Le Bagré comme savoir et comme récit " vrai "
L'illusion narrative ?
6. Objections au roman
7. Les représentations du sexe et leur déni
L'Inde
L'Afrique
L'Europe
La Chine
8. Culture et cognition
Bibliographie.