Pourquoi, malgré des intentions parfois sincères et orientées vers le bien-être de leurs populations, les États modernes les ont-ils si souvent malmenées, voire meurtries ? Pourquoi, malgré les moyens colossaux mis en œuvre, les grands projets de développement ont-ils si tragiquement échoué et abîmé l'environnement ? Dans cette étude foisonnante, James Scott démonte les logiques bureaucratiques et scientifiques au fondement de ces projets " haut-modernistes ", poussant à toujours plus de lisibilité et de contrôle sur la nature et les sociétés humaines.
À partir d'une large palette d'études de cas allant de la foresterie scientifique à la création des premiers recensements et des noms propres, de la doctrine révolutionnaire de Lénine à la collectivisation de l'agriculture soviétique, Scott dénonce ces entreprises de planification autoritaire qui finissent par appauvrir et par étouffer le monde physique et social.
À l'encontre de ces approches abstraites, centralisées et surplombantes, ce livre défend le rôle de formes de savoirs situés plus modestes, étroitement liées à l'expérience pratique et davantage capables d'adaptation au gré des circonstances.
2021-01-13 - Joseph Confavreux - Mediapart
Son oeil, James C. Scott l'a posé sur l'État depuis un moment. Dans ce livre écrit en 1997, qui vient d'être traduit, l'anthropologue s'intéresse avec une érudition enthousiasmante à tout ce que la modélisation d'État manque et tente de réprimer. [...] Cette contre histoire de la modernité invite à la vigilance, car, dans les temps de crise, les fantasmes de grandes transformations trouvent un écho particulièrement favorable, " au nom et avec le soutien de citoyens en quête d'assistance et de protection ".
2021-02-01 - Cédric Enjalber - Philosophie Magazine
L'oeuvre phare de James C.Scott, dont la réflexion est plus que jamais d'actualité.
2021-02-01 - Maxime Rovère - Lire Magazine littéraire
L'anthropologue James Scott n'a cessé de travailler sur la question de l'Etat : à quoi sert-il ? Qu'empêche-t-il ? Dans ce volume imposant, il examine la façon dont les Etats modernes ont entrepris d'homogénéiser la nature et les sociétés humaines pour les rendre plus " lisibles " et donc plus contrôlables.
2021-05-20 - Éric Aeschimann - L'Obs
Remerciements
Introduction
I. Les projets étatiques de lisibilité et de simplification
1. Nature et espace
État et sylviculture scientifique : une parabole
Faits sociaux, crus et cuits
Fabriquer les outils de la lisibilité : mesures populaires, mesures étatiques
Régimes fonciers : pratiques locales et raccourcis fiscaux
2. Villes, langues, peuples
La création des patronymes
Le décret instituant une langue officielle standardisée
La centralisation des transports
II. Visions transformatrices
3. Le haut-modernisme autoritaire
La découverte de la société
L'autorité radicale du haut-modernisme
Le haut-modernisme au XXe siècle
4. La ville haut-moderniste : une expérience et sa critique
Urbanisme total
Brasília : la ville haut-moderniste (presque) construite
Le Corbusier à Chandigarh
Jane Jacobs, pourfendeuse de l'urbanisme haut-moderniste
5. Le Parti révolutionnaire : un plan et un diagnostic
Lénine, architecte et ingénieur de la révolution
Luxemburg : docteure et accoucheuse de la révolution
Alexandra Kollontai et l'Opposition ouvrière à Lénine
III. L'ingénierie sociale de la production rurale et du réaménagement des campagnes
6. Collectivisation soviétique, rêves capitalistes
Un fétiche américano-soviétique : l'agriculture industrielle
La collectivisation en Union soviétique
Paysages étatiques de contrôle et d'appropriation
Les limites du haut-modernisme autoritaire
7. Villagisation forcée en Tanzanie : esthétique et miniaturisation
L'agriculture coloniale haut-moderniste en Afrique de l'Est
Villages et agriculture " améliorée " en Tanzanie avant 1973
" Vivre au sein de villages est un ordre "
Le village d'État " idéal " : variation éthiopienne
Conclusion
8. Domestiquer la nature : une agriculture de la lisibilité et de la simplicité
Variétés de simplifications agricoles
Le catéchisme de l'agriculture haut-moderniste
Foi moderniste contre pratiques locales
Les affinités institutionnelles de l'agriculture haut-moderniste
Les hypothèses simplificatrices des sciences agricoles
La pratique simplificatrice de l'agriculture scientifique
Deux logiques agricoles comparées
Conclusion
IV. Le chaînon manquant
9. Simplifications " minces " et savoir pratique : la mētis
La métis : les contours du savoir pratique
Le contexte social de la
mētis et sa destruction
Les arguments contre le savoir impérial
Conclusion
" C'est l'ignorance, imbécile ! "
Planification pour citoyens abstraits
Dépouiller la réalité jusqu'à l'essentiel
L'échec des schémas simplifiés et le rôle de la
mētis
Plaidoyer en faveur d'institutions favorables à la
mētis.