Comment penser l'ébranlement qu'a suscité le passage, aux XIXe et XXe siècles, d'un monde d'empires, gouvernant par la différence ethnique et religieuse, à un système d'États-nations, imposant une uniformisation culturelle et une conception exclusive de la citoyenneté ? Question fondamentale à laquelle ce livre apporte une réponse originale, en montrant qu'un tel processus a nourri des logiques souvent présentées comme contradictoires, mais en réalité synergiques : la mondialisation, l'universalisation de l'État-nation et la généralisation de consciences identitaristes. Le basculement d'un type de domination à un autre sous-tend nombre de conflits contemporains et de retours de flamme nationalistes.
La forme du pouvoir d'État qui émerge de cette séquence est abstraite et bureaucratique, englobant l'ensemble de la société. Sa domination s'exerce à travers des styles politiques, discursifs, vestimentaires, artistiques, à travers l'invention d'une tradition, d'un passé national mythique. Elle se concrétise à la croisée de la coercition et de l'hégémonie. Les sociétés politiques se présentent comme des feuilletés temporels, où coexistent de manière singulière des rapports de pouvoir et des figures imaginaires inscrites dans l'histoire longue.
Fourmillant d'observations concrètes, L'Énergie de l'État propose une critique novatrice de la domination contemporaine et de sa bêtise identitaire. Tout en mettant au jour les structures, les logiques communes, elle rend justice à la spécificité de chaque État. Un essai théorique majeur qui vient à point nommé, alors que le monde travestit son passé et doute de son avenir.
2022-05-11 - Xavier Mellet - Lectures
Avant-propos
Introduction. Comparaison est raison
Le théorème du camembert
Comparaison et singularisation
Une première illustration de la raison comparative : l'" État familial "
L'" État familial ", thème et variations
Retour sur l'énonciation du politique
De la contingence de l'évènement
Cause toujours, tu m'intéresses
Échapper à l'univocité
Le Plein et le Vide de la domination politique ou sortir de la " merde anhistorique "
Comparer pour comprendre l'" individu historique " de l'État
Première partie
L'abstraction de l'État
1. L'événement de l'État
L'abstraction de l'État en cinq points
Les aléas de l'abstraction
L'abstraction est-elle une exception ?
Singer l'Europe ?
L'État de distorsion
Comparer par le bas
Une mue de l'abstraction ?
La triangulation globale
L'expansion impériale du XIXe siècle en toile de fond
La délimitation des espaces historiques, ou le dilemme du pêcheur de perles
2. Les avatars de la domination : empire, État, nation
Privé/public : les liaisons dangereuses
L'empire
L'État-nation
3. Le passage de l'empire à l'État-nation
Les empires ne meurent pas de la nation
Des " nations d'empire "
La guerre, matrice de l'État-nation
La focale des minorités impériales
La focale notabiliaire et provinciale
La focale des mots, des symboles et des notes
États d'empire
De l'un à l'autre
4. L'État, fabrique de l'inégalité sociale
Pouvoir et richesses : retour sur image
L'État, producteur des catégories de l'inégalité
La formation asymétrique de l'État
Seconde partie
L'imagination de l'État
5. La domination, une affaire de style
Le style, c'est l'homme (ou la bête)
Style et constitution du sujet moral
Style et capitalisme
Styles de vie et abstraction de l'État : retour sur auteurs
La " puissance de la forme " (et ses limites)
Le style de domination : retour sur image
6. Hégémonie et coercition
D'un meilleur usage du concept de société civile
L'obéissance comme " action en entente "
Kouroussi bô (" enlève ton pantalon ")
L'invention coercitive du politique
La cité coercitive
La nécessaire ambivalence du politique
Conclusion. La durée de l'État
Abstraction de l'État et compénétration des durées
Que chercher ?
Générique. Personnages conceptuels
Repères bibliographiques
Index des personnages conceptuels
Index des noms.