L'exigence d'impartialité est indissociable de l'idée même de justice. Mais qu'est-ce, au juste, que l'impartialité ? Qu'est-ce exactement qu'un juge impartial ?
Selon le Larousse, l'impartialité est la qualité, le caractère de quelqu'un qui n'a aucun parti pris ou de ce qui est juste, équitable. Exemple : juger avec impartialité. Pour Le Petit Robert, c'est la qualité d'une personne impartiale (l'historien par exemple) ou encore d'un jugement – en rapport avec l'équité et l'objectivité. On connaît le mot d'Hubert Beuve-Méry, le fondateur du Monde : L'objectivité n'existe pas. L'honnêteté, oui ! Qu'en est-il donc de l'impartialité ?
Rapportée au seul champ juridictionnel, cette notion renvoie à des usages divers, professionnels ou profanes, portant souvent la double empreinte (qui n'est paradoxale qu'en apparence) de l'indécision et de l'incantation : au fond, personne ne sait très bien ce que l'impartialité veut dire, mais tout le monde l'invoque. Une certitude : l'impartialité est un devoir pour le juge et un droit pour le justiciable. Ensuite, toutes les confusions semblent permises.
Délibérée a choisi de reprendre cette question sérieuse en dépit ou plutôt en raison des caricatures qu'elle suscite – et qui pourraient être ainsi résumées : tout juge qui ne me donne pas raison est partial, pour une raison ou pour une autre (au choix). Cette question est, à vrai dire, lourde d'enjeux : il en va non seulement de la manière dont on conçoit l'institution judiciaire, mais aussi de l'idée que l'on se fait de l'acte de juger lui-même et de la légitimité de ceux qui l'accomplissent.
Pour travailler en profondeur ce sujet, la revue animée par le Syndicat de la magistrature a choisi de croiser les approches (juridique, politique, historique et sociologique). Il sera donc question dans ce dossier de circonscrire aussi précisément que possible ce qu'est (et ce que n'est pas) l'impartialité du juge (dans la jurisprudence et au-delà), de déconstruire les tentatives d'instrumentalisation politique de ce concept, d'observer sociologiquement le juge en ses biais, d'interroger la culture française du juge (à travers notamment la figure historique du bon juge) ou encore de rappeler le sens (trop souvent détourné) de la fameuse Harangue de Baudot appelant les futurs magistrats à être partiaux.
Carte blanche à Geneviève Guidicelli-Delage
Pour l'égalité
Dossier : Qu'est-ce qu'un juge impartial ?
Impartialité et subjectivité,
par Benoist Hurel
De l'impartialité à la neutralité,
par Matthieu Bonduelle et Thérèse Renault
L'acte de juger et ses biais,
par Jacques Farget
La harangue de Baudot, plaidoyer pour une impartialité réelle
, par Simone Gaboriau
Le bon juge Magnaud et l'imaginaire de la magistrature du XXe siècle,
par Arnaud-Dominique Houte
Varia
Détecter et prévenir
Le droit pénal saisi par la dangerosité,
par Jean-Claude Bouvier
Le long chemin de l'accès à la justice en outre-mer,
par Juliane Pinsard
Refuser d'accueillir
La France et les " indésirables " de la Guerre d'Espagne,
par Maëlle Maugendre
" La religion en prison " : réel et effet de réalité,
par Thibault Ducloux
Les rubriques
Justice partout
La justice dans la transition au Burkina Faso,
par Isabelle Saliou
Justice pour tous
Écrivain public, un vieux métier d'avenir,
par Sylvie Monteillet
Audition libre
" On ne rend pas la justice propre sans se salir les mains ",
entretien avec Anne Landois
Guérillas juridiques
Conquérir des droits pour les personnes LGBTI,
par Caroline Mécary
Souverains poncifs
La procédure de surendettement, un cadeau fait aux pauvres ?
par Gaëlle Martin
Pièces à conviction (s)
Livres, films, etc.