Dans la mémoire des Français, la Première Guerre mondiale et ses images sanglantes restent comme l'incarnation du mal absolu. Mais la guerre de 1914 ne se limite pas à cette horreur, aux poilus pris dans les tranchées boueuses, aux ambulancières héroïque et aux enfants mutilés. Elle a emporté tout un peuple à se mobiliser au nom de la patrie, et en particulier les intellectuels qui se sont emparés de la boucherie pour écrire des livres ou de la musique, peindre des toiles, sculpter, philosopher. Et cette guerre peut aussi se comprendre vue d'un " autre front ", celui de la vie de l'esprit, où intellectuels et artistes, mobilisés ou pas, se sont mis, pour la première fois avec cette intensité, au service d'une cause : la guerre, le plus souvent, mais parfois aussi, la paix en inventant la dissidence. Ce livre, en embrassant la Première Guerre mondiale dans une durée plus longue que celle qui lui réserve habituellement l'histoire politique et militaire, tente de contribuer à une nouvelle histoire culturelle d'un conflit que l'on ne peut décidément plus comprendre du seul point de vue des canons. Il mesure l'engagement des intellectuels à l'aune de leur avant-guerre et apprécie les premières blessures que le conflit laissa à l'âme du XXe siècle. Il prend enfin en charge les incohérences d'un temps qui vit le retour des conformismes esthétiques et des conservatismes politiques les plus décisives pour notre modernité. Pour le meilleur et pour le pire.
Christophe Prochasson, historien, est directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales. Il est membre de la rédaction de Mil neuf cent. Revue d'histoire intellectuelle et de Mouvement social. Il collabore à la collection " Repères " (Éditions La Découverte).
Anne Rasmussen, historienne, est maître de conférences à l'université de Strasbourg I, membre de la rédaction de Mil neuf cent. Revue d'histoire intellectuelle et de Mouvement social, elle est aussi auteur (en collaboration avec Brigitte Schroeder-Gudehus) de Les fastes du progrès. Le guide des Expositions universelles, 1815-1992 (Flammarion, 1992).
" Ce livre solide et d'une probité indéniable éclaire de manière inédite et intelligente tout un pan d'histoire longtemps obscurci par les passions. "
LE FIGARO
" Au travers d'une analyse des livres, manifestes, revues correspondances produits dans la période les auteurs se sont donc attachés à saisir la part prise dans cet affrontement par les intellectuels français. Récusant l'image d'une guerre accoucheuse de modernité, ils ont préféré inscrire leur réflexion dans la moyenne durée. A juste titre car le vrai tournant est antérieur marqué dès les années 1910 par un changement de sensibilité qui s'exprima de manière diverse ( du renouveau catholique façon Péguy ou Maritain à l'esprit NRF en passant par le vitalisme ou le cubisme), mais qui témoigna partout d'un même refus de l'intellectualisme et d'un même désir de régénération, à forte emprise nationale. "
LIBÉRATION
2024-11-21 - PRESSE
Introduction -
1. Au temps d'Agathon - La nouvelle donne politique - Agathon et les autres - Autour de 1913 -
2. Les années NRF ?- Naissance d'une légende - La nébuleuse vitalise - Passages en revues -
3. Des avant-gardes intellectuelles ? Savants, philosophes et artistes des années 1910 - crises et renouvellements scientifiques - les philosophes et l'intellectualisme - Peintres en révolutions -
4. Guerres et paix - Un engagement sans concession - L'invention de la dissidence - pratiques et milieux du pacifisme -
5. Au service de la nation - Artistes en guerre - L'Université mobilisée - L'engagement des savants -
6. Les feux d'Octobre - Le voyage à Moscou - Sauver la culture -
7. Leur après-guerre - Les intellectuels après le désastre - premiers regards sur la guerre - Un retour à l'ordre ? -
Conclusion -
Orientations bibliographiques -
Index des noms.